[CANNES 2019] Les 10 films les plus chaos du festival

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Cette 72e édition du Festival de Cannes touche à sa fin. C’est l’heure du bilan et tout le monde se pose la question: quels étaient les dix films les plus chaos cette année?

1. MEKTOUB, MY LOVE: INTERMEZZO de Abdellatif Kechiche (Compétition)
N’écoutez personne. Sachez juste qu’il y a un avant et un après ce monument, potentiellement perverti par les ligues de vertu et le puritanisme galopant. C’est littéralement une expérience de vie qui se vit tout seul, face à soi-même, et ce ne sont pas des conneries. Avant de le voir, un conseil d’ami: faites tout ce que vous pouvez pour le voir vierge de tout. Ne lisez rien, n’écoutez rien, ne parlez à personne: venez nu! Pour citer notre confrère Julien Gester de Libération, c’est le suprême intermezzo du Chaos. Vous en reviendrez vivant mais différent. Comme chez Eustache. Tout ce que l’on demande au cinéma. Lire notre point de vue garanti sans spoiler ni filtre idéologique douteux.

2. LIBERTE de Albert Serra (Un Certain Regard)
Pervers un jour, pervers toujours. Voilà un merveilleux porno Dandy-libertin qui, comme le dit si bien notre ami Philippe Azoury, mériterait deux Palmes d’or et face auquel tous les autres films présentés cette année sont bidons (sauf le Kechiche, of course). Une plongée nocturne dans les mœurs pas très catholiques de libertins venus s’encanailler dans la Prusse de 1774. Avant l’aube révélant les décombres de la nuit. On sort de la salle tel un mutant sous hypnose: autre, sale, heureux, chaos. On adore ça. Joie de nous lire, plaisir de nous rejoindre.

3. UNE GRANDE FILLE de Kantemir Balagov (Un Certain Regard)
Nous sommes en 1945. Tout est démoli, tout est à reconstruire. La Seconde Guerre mondiale a ravagé Leningrad et dans ce monde de ruines, trop grand pour être appréhendé, deux jeunes femmes de rien tentent de se reconstruire et de reconstruire ce qu’elles ont perdu ou démoli. Un film si habité, si adulte, si pénétrant que l’on croit absolument à tout ce qui s’y passe. Et qui agit violemment sur nous. Soit du pur cinéma du corps qui touche à l’os (comme le disait Pialat). Lire notre tressage de lauriers.

4. PARASITE de Bong Joon Ho (Compétition)
Attendu (mais peut-être pas à ce niveau chef-d’œuvresque de classique instantané), Parasite se révèle bien une merveille de satire, brûlante comme l’enfer, qui triomphe à tous les niveaux (drame familial, thriller social, brulot politique) et qui nous donne envie d’appeler à la rescousse toute une batterie de superlatifs débiles et galvaudés. Disons simplement qu’il s’agit là de la confirmation que le cinéma de Bong Joon Ho (toujours surprenant, toujours à prendre des risques) ne ressemble qu’à lui-même. La marque impressionnante d’un super-auteur.

5. A WHITE, WHITE DAY de Hlynur Palmason (Semaine de la critique)
Le nouveau long métrage du réalisateur de Winter Brothers, à la hauteur des promesses chaos. Dans une petite ville perdue d’Islande, un homme sombre dans la folie après la mort de sa femme, et le film entre ombre persistante et lumière aveuglante de décliner sa musique de l’étrange, de multiplier les visions hallucinées guidant vers une révélation (la vérité nue) du genre costaud. Envoûtement total en ce qui nous concerne.

6. ETRE VIVANT ET LE SAVOIR de Alain Cavalier (Hors-compétition)
Quand l’homme à la caméra (DV) rend hommage à Emmanuèle Bernheim. Un objet unique et splendide, commencé bien avant la disparition de l’écrivaine, survenue en 2017. Oui, le chaos s’invite là où il n’est pas du tout pressenti et c’est ça qui est beau. On en dit le plus grand bien ici.

7. BACURAU de Kleber Mendonça Filho & Juliano Dornelles (Compétition)
Quand le réalisateur de Aquarius coréalise un western futuriste horrifique, exauçant entre autres exploits fous la réunion improbable de deux personnalités aux antipodes l’une de l’autre (Sônia Braga et Udo Kier) et où tout est affaire de cinéma – et, fort probablement, de politique (Jair Bolsonaro, si tu nous lis entre les lignes). Bordélique, bien sûr mais über chaos par essence.

8. ZOMBI CHILD de Bertrand Bonello (Quinzaine des réalisateurs)
De l’exploitation, Bonello fait de l’exploration. Ne pas s’attendre à un film d’horreur ou un film de zombie dans les règles de l’art, le réalisateur de Saint-Laurent privilégie, lui, une ambiance belle-bizarre qui ne ressemble qu’à ses intuitions et raconte un récit de transmission et de liberté. Emportés nous avons été.

9. L’ANGLE MORT de Pierre Trividic et Patrick Mario-Bernard (ACID)
ENFIN des nouvelles des réalisateurs de Dancing et L’autre avec cette histoire de jeune quadra voyant son don d’invisibilité se détraquer progressivement. On l’attendait fort, on est comblé. Joli morceau de chaos.

10. TOMMASO de Abel Ferrara (Séance spéciale)
L’ex-ponte du cinéma agressif et furibard délivre un autobiopic déguisé tout modeste où la petite chronique familiale idyllique se métamorphose en sombre tragédie fantasmagorique, avec tiraillements religieux propres au cinéma du père Abel. Peut-être l’un des films les plus noirs présentés cette année. A prendre ou à laisser (nous, on prend).

5 CONSEILS DE FILMS CHAOS A CANNES

KARELLE FITOUSSI (Paris Match)
Mektoub, my love: Intermezzo de Abdellatif Kechiche (Compétition)
Parasite de Bong Joon Ho (compétition)
Vivarium de Lorcan Finnegan (Semaine de la critique)
Lux Æterna de Gaspar Noé (Séance de minuit)
Zombi Child de Bertrand Bonello (Quinzaine des réalisateurs)

JEAN-JACKY GOLDBERG (Les Inrocks)
Mektoub, my love: Intermezzo de Abdellatif Kechiche (Compétition)
Une fille facile de Rebecca Zlotowski (Quinzaine des réalisateurs)
Lux Æterna de Gaspar Noé (Séance de minuit)
Por El Dinero de Alejo Moguillansky (Quinzaine des réalisateurs)
The Climb de Michael Angelo Covino (Un Certain Regard)

THOMAS BAUREZ (Première)
Libérté de Albert Serra (Un Certain Regard)
Abou Leila de Amin Sidi-Boumedine (Semaine de la critique)
Jeanne de Bruno Dumont (Un Certain Regard)
Une fille facile de Rebecca Zlotowski (Quinzaine des réalisateurs)
Viendra le feu de Olivier Laxe (Un Certain Regard)

PHILIPPE ROUYER (Positif)
Parasite de Bong Joon Ho (Compétition)
Une vie cachée de Terrence Malick (Compétition)
Mektoub, my love: Intermezzo de Abdellatif Kechiche (Compétition)
Jeanne de Bruno Dumont (Un Certain Regard)
J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin (Semaine de la critique)

GERARD DELORME (Chaos)
Une vie cachée de Terrence Malick (Compétition)
Parasite de Bong Joon Ho (Compétition)
Once Upon A Time… In Hollywood de Quentin Tarantino (Compétition)
The Lighthouse de Robert Eggers (Quinzaine des réalisateurs)
Lux Æterna de Gaspar Noé (Séance de minuit)

PHILIPPE AZOURY (Vanity Fair)
Mektoub, my love: Intermezzo de Abdellatif Kechiche (Compétition)
Liberté de Albert Serra (Un Certain Regard)
Parasite de Bong Joon Ho (Compétition)
Bacurau de Kleber Mendonça Filho & Juliano Dornelles (Compétition)
The Dead Don’t Die de Jim Jarmusch (Compétition)

THOMAS AIDAN (7e Obsession)
Douleur et gloire de Pedro Almodovar (Compétition)
Mektoub, my love: Intermezzo de Abdellatif Kechiche (Compétition)
Parasite de Bong Joon Ho (Compétition)
Jeanne de Bruno Dumont (Un Certain Regard)
Zombi Child de Bertrand Bonello (Quinzaine des réalisateurs)

JULIEN GESTER (Libération)
Mektoub, my love: Intermezzo de Abdellatif Kechiche (Compétition)
«Impossible d’aligner un autre titre derrière celui du Kechiche, suprême intermezzo du chaos

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